Fermeture de l’accueil des SDF : « Hors de question de côtoyer des pauvres! »

L’accueil de jour permettait à certaines personnes vivant dans la précarité de trouver non seulement un réconfort nécessaire mais également un accompagnement social primordial.

Le service social s’est stoppé le 31 mars. Le maire de Thonon-les-Bains et président de Thonon Agglo, Christophe Arminjon, assure que le Conseil Départemental de la Haute-Savoie est à la recherche d’un nouveau gestionnaire.

Des candidatures auraient émergé mais la question n’est pas encore réglée. Une question de temps pour l’édile qui dit être prêt à travailler à la recherche d’un nouveau local avec le futur gestionnaire, pour que quelqu’un d’autre continue d’accompagner 200 personnes.

Pour rappel, le service était auparavant municipal, puis confié à une association en 2013, qui n’a pas réussi à se pérenniser face aux difficultés. Pourquoi alors ne pas revenir à un modèle communal ? Parce que, comme le rappelle le nouvel édile, le social est une compétence du Département. Et d’ajouter : « En plus, j’ai un million à injecter dans le marché de Noël, vous croyez que l’argent ça pousse tout seul dans le parc des thermes ? Bah non, il faut prioriser dans la vie, gérer en bon père de famille et un bon père il met des étoiles dans les yeux de ses enfants à Noël ». Tandis que, de son côté, le Conseil Départemental, n’a plus d’argent non plus : « Non mais vous vous rendez pas bien compte de combien on dépense pour renflouer la MAL et pour payer l’autoroute du Chablais entre les études, les travaux et les subventions d’équilibre pour rembourser le concessionnaire », souligne Richard Baud, conseiller départemental

Manif de gauchaux

Malgré tout, certains s’élèvent contre la situation. De nombreux Thononais, soutenus par “Nouvelle Ère”, le parti du conseiller socialiste Jean-Baptiste Baud, s’émeuvent et ont appelé à manifester.

Nous étions présents à cette manifestation, chargée d’émotion et d’humanité dont les slogans résonnaient dans les cœurs :

« On veut accueillir personne, mais on exige que les autres le fassent ! », scandaient certains manifestants.

Pour autant, les participants faisaient grise mine. « Si les associations disparaissent, on va finir par être obligé de côtoyer les pauvres pour les aider, vous imaginez ? j’ai la gerbe… », nous livre un petit bobo avant de se faire couper par son ami :

« Il a raison ! Je veux continuer à acheter ma bonne conscience à distance, hors de question de mettre les mains dans la merde ! Nan mais on va où ?! D’un côté on a le Rotary et le Lions Club qui ne veulent pas de nous, et de l’autre côté les associations de clochards ferment leurs portes. On n’a plus aucun recours… on ne va quand même pas devoir aider réellement les gens non ? »


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Le monopole du misérabilisme

Nous finissons par croiser le conseiller municipal d’opposition J.B. Baud, qui nous avoue sans tortiller du cul :

« Vous savez on a une tradition à gauche, celle de la solidarité mais avec l’argent des autres et tout en faisant de la récupération politique des pauvres ! Nous mettrons tout en œuvre afin d’assurer la continuité et le respect scrupuleux de ces principes. C’est donc tout naturellement que nous nous battrons jusqu’au bout pour que des gens accueillent des pauvres ; mais je peux vous assurer que JAMAIS, vous entendez, JA-MAIS aucun de nous ou des concitoyens présents à la manifestation de ce jour ne mettrons ne serait-ce qu’un ongle dans toute cette merde. Nous continuerons à gueuler tant que cela sera nécessaire jusqu’à ce que des gens réellement compétents prennent leurs responsabilités. »

Quid de la suite ?

Mais les rebondissements se succèdent sur l’avenir de la structure. L’occasion de faire remarquer à Sophie Para D’andert, la numéro 2 de Jean-Baptiste Baud, qu’elle avait un peu sur-joué, et celle-ci de rétorquer « Mais chuis bien obligée ! C’est mon travail de politicien de gauche ! ».

Au-delà des querelles de clocher, la volonté affichée est de délocaliser l’accueil de jour dans l’hôtel des vallées prochainement rénové.

Mais la Croix-Rouge qui devait porter le projet a été contrainte de se retirer faute de vision humaniste de l’Etat et faute d’argent également, vu que dans le budget présenté par les hautes instances « y’avait un trou » entend-on.

En attendant, le chef de la municipalité s’entêtera-t-il dans son fameux « c’est pas moi, c’est l’Etat », tranchant drastiquement avec son prédécesseur et le mythique « c’est pas moi, c’est l’Europe » ?

Jean-Baptiste Baud retournera-t-il manifester pour quelques voix malgré les trois centimètres de neige et le froid ?

Claude Manillier, le délégué de l’agglo à la politique du territoire, viendra-t-il donner des leçons ?

Franck Dalibard apportera-t-il de la confiture aux plus démunis ?

Autant de questions qui auront peut-être des réponses au prochain conseil municipal. Qui sait.

Pierre Habé

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