
Deux sénateurs du département ont trouvé le moyen de contourner la réglementation environnementale qui les font chier : faire passer une loi pour éviter la loi. Rencontre
En effet, ces fameux plans locaux d’urbanisme peuvent être perçus comme de véritables garde-fous eu égard aux enquêtes publiques engagées dans le processus de révision et à l’information éclairée qui est dispensée au public à cette occasion. Notamment, en l’occurrence, quant aux impacts environnementaux au sens large.
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Problème de timing
Le député haut-savoyard Cyril Pellevat explique, de manière cristalline, que si on en est là c’est à cause d’« un contexte procédural complexe lié à une évolution du PLUi concomitante à une évolution du périmètre de la collectivité, le tout sur la même période que la DUP ». Tout simplement.
On s’attendait donc logiquement à une révision du PLUi, avec les enquêtes d’usage, pour informer au mieux et anticiper les conséquences des ouvrages d’urbanisme. Les plus optimistes, face à une procédure trop complexe (ou des exécutants incompétents, cela dépend du point de vue) espéraient même une adaptation de la procédure à l’évolution locale (ou une campagne de recrutement de gens compétents)… Il n’en sera rien. À la place : une loi !
La Messagère à donc enquêté sur cette curiosité législative qui chamboule le fonctionnement démocratique habituel, en s’adressant directement au chef du Sénat : Gérard “Clint” Larcher.
Rencontre avec une flèche
C’est par une froide journée d’hiver que l’œil-de-faucon de la chambre haute du parlement nous accueille chaleureusement en plein hémicycle, empressé d’échanger.
« De quoi parle t’on ? » s’interroge-t-il avant même de nous serrer la main. « On se fait tellement chier en ce moment, je suis content de vous voir, dites-moi de que vous voulez, même, proposez moi une loi si vous voulez, on s’en fout, on la vote. »
Nous lui parlons alors de la proposition de loi à l’initiative de Sylvianne Noël et Cyril Pellevat concernant l’autoroute la plus connue du Chablais mais que personne n’a jamais vu. Il nous arrête alors :
« Attention je vous vois arriver les journaleux, vous ne me ferez jamais dire que le consentement éclairé des administrés, Cyril Pellevat, il se torche avec tous les matins ! Non, vraiment, la vérité c’est qu’on s’emmerde comme des rats morts ici, du coup on se vote des lois à la con. Et y’a un moment c’était au tour de Cyril et il a proposé sa loi pour le PLUi du Bas-Chablais qui permettra à votre Agglo dysfonctionnelle de faire un bras d’honneur à l’autorité environnementale pour construire plus vite son autoroute ». Aucun parallèle possible avec le récent rapport sénatorial qui pointe une « rentabilité hors-normes » des sociétés autoroutières, donc.
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Face à notre consternation Hawkeye en décoche une de plus : « T’es d’où toi, t’es le fils à qui ? ». Une expression qui n’est pas sans nous rappeler la précédente disparition d’un ethnologue. « T’es de La forcl’ ? Et ben tiens, si on a le temps on va se faire le PLUi du Haut-Chablais, ça fait 6 mois qu’il est en place mais on s’en fou on se fait chier… Et puis si le pinard et bon on se fera Annemasse Agglo tant qu’on y est ! »
Vent de boue
En dépit de la ferveur de l’archer du Sénat, de nombreux conseillers régionaux, sénateurs, associations locales dont la Confédération Paysanne de Haute-Savoie et autres associations de chasses ont manifesté leur hostilité face la méthode employée :
« Si on commence à faire n’importe quoi dès qu’on se fait un peu chier, il va y avoir des dégâts. » En effet, nous relevions récemment que se faire chier, on est habitué ici…
C’est le 31 janvier prochain que le Sénat tentera peut-être un grand Chelem des PLUi du Chablais ; Le PLUi sera-t-il modifié ? Qui d’Elisabeth l’écolo ou de Jean-Christophe le pro-goudron boira sa coupe de champagne ?
La suite au prochain épisode …
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